Nous avons déjà eu l’occasion de saluer la qualité et l’intérêt de tous les ouvrages des éditions Gallmeister publiés dans la collection « Nature Writing » : Sukkwan Island de David Van, Le Signal de Ron Carlson, L’Or des fous et Sortilèges de l’Ouest de Rob Schulteis, etc. A quoi nous ajouterons ceux de la série « Collection Noire », de Little Bird, Le Camp des morts, L’Indien blanc de Craig Johnson à Casco Bay de William G. Tapply en passant par La Rivière de sang de Jim Tenuto.

Chinook (le nom d’un vent qui balaie le Montana) de Pete Fromm est un recueil de nouvelles. Un genre curieusement boudé par les Français alors que les Anglo-Saxons, qui y excellent, en sont friands.

Avant de se consacrer à l’écriture, Pete Fromm, né dans le Wisconsin, mais désormais installé à Missoula dans le Montana, a été Ranger. On l’a découvert avec Indian Creek et Avant la nuit. Et on l’a plus quitté.

Seize nouvelles, donc, dont « Chinook » qui a donné son titre à l’ouvrage (titre original : Dry rain), pour raconter des histoires simples (et parfois un peu plus compliquées) de gens simples (et parfois un peu plus complexes).

« Hoot », d’abord, qui nous dit les amours impossibles d’un p’tit gars qui se débat avec sa ferme et d’une jolie huttérienne. Les huttériens sont une communauté un peu dans le genre des Amish, issus d’une secte allemande du XVIe siècle et qui a conservé ses us et coutumes aux Etats-Unis et au Canada. Des mœurs séculaires et très austères. Par dérision, on les a surnommés hoot (jeu de mots à partir de hutt), ce qui signifie « désopilant », « ridicule ».

On aime aussi « Pluie sèche », histoire d’un gamin qui n’ose avouer à sa mère, au téléphone, que son père – désespéré de sa séparation avec sa femme – vient de le kidnapper.

Toutes les nouvelles de Chinook sont d’une même force, à la marge de la solitude, de l’amour perdu, du désespoir. Des gens « ordinaires » confrontés, au hasard de la vie, à des situations « extraordinaires ». Et qui s’en tirent – mais pas toujours – avec les moyens du bord. Dans un décor qui est tout sauf banal. Les espaces courent jusqu’au bout du ciel. Les arbres tutoient les nuages. Les saisons sont extrêmes. Et les sentiments sont à la (dé)mesure de ces immensités.

Pour un connaisseur comme David James Duncan, Pete Fromm est « le Tchekhov de Great Falls ». Pour William Kittredge, « il est temps que Pete Fromm soit reconnu comme un auteur américain ». Thomas McGuane explique : « Je lis Pete Fromm avec une admiration grandissante pour la vigueur de son écriture et de sa grandeur d’âme. » Même pluie d’éloges de Rick Bass, Mark Sragg, Chris Offut.

On est là, en effet, dans la grande littérature qui consiste souvent à hisser à la hauteur d’une épopée des petites tranches de vie. Ces gens-là sont rudes. Parce que la nature dans laquelle ils baignent n’est pas forcément accueillante, même s’ils s’en accommodent.

Alain Sanders

- Editions Gallmeister, 14, rue du Regard, 75006 Paris.

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