WINTER'S BONE

 

Des monts Ozark, dans le Missouri, j’ai de grands souvenirs. D’abord parce que le mot Ozark dérive du français "aux arcs", un nom dû aux trappeurs français pour décrire les méandres d’un fleuve serpentueux. Ensuite, parce que j’étais là même où se situe l’action du superbe roman de Harold Bell Wrigh, The Sheperd of the Hills, paru en 1907 et, hélas, jamais publié en France alors que c’est un des chefs-d’œuvre de la littéraire américaine. Ce roman fut, en revanche, adapté au cinéma – et sous ce titre – en 1941, par Henry Hathaway. Avec John Wayne et Betty Field. Il n’est jamais sorti en France à ma connaissance.

Winter’s Bone de Debra Granik, et qui se passe dans les monts Ozark, est adapté d’un roman de Daniel Woodrell au titre éponyme et qui, lui, a été publié en France : Un hiver de glace (Rivages, 2006). Debra Granik, qui a su s’entourer d’acteurs exceptionnels (Jennifer Lawrence, John Hawkes, Sheryl Lee) a consacré quatre ans de sa vie à la réalisation de ce "petit" film indépendant qui a obtenu le prix du meilleur film et du meilleur scénario au festival de Sundance en 2010. Debra Granik explique :

– Anne Rossellini, avec qui j’ai écrit le script, et moi, avons utilisé des comédiens professionnels et des gens du coin. Le personnage du clan, par exemple, est un motard de la Bikers Church. Un type passionnant, ancien du Vietnam qui sillonne tout le pays à moto depuis des années. Son surnom, c’est Stray Dog ["le chien errant"]. Il l’a inscrit sur son blouson, et c’est un bon résumé de son existence. Il est un témoin, un reporter de ce que la vie peut avoir de difficile en Amérique.

Le sud du Missouri, c’est une région où l’on chasse pour manger, où l’on garde sa voiture trente ans, où les enfants ne vont à l’école que quatre jours par semaine (les autres étant consacrés à l’aide de leur famille), où l’on mange de l’écureuil. Un pays de hillbillies (1). A savoir pour les citadins méprisants, des ploucs, des bouseux.

Pour Ree, c’est un voyage au bout de l’enfer et la plongée dans un univers qui n’est pas sans rappeler Délivrance (John Boorman, 1972), Sans retour (Walter Hill, 1981), ou encore Down to the Bone (2004) (2) de Debra Granik déjà, qui s’est promis de ne faire que des films contenant le mot bone (l’os). Son prochain film, tiré lui aussi d’un roman ? Rule of the Bone

Dans les monts Ozark, la vie n’est pas un long fleuve tranquille. Mais quelle vie !

Alain Sanders

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(1) Ce qui nous vaut une soirée de musique hillbilly (l’ancien nom de la musique country) de toute beauté.
(2) Mais aussi White Lightin’ (Dominique Murphy) ou Frozen River (Courtney Hunt).


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