Cheryl Strayed : Wild
Sur le chemin des Crêtes du Pacifique

 

A noter, parce que c’est amusant et significatif en l’occurrence, que le nom de famille de l’auteur, Strayed, est le participe passé du verbe to stray. Et qu’il signifie donc « perdu », « égaré », « errant ». Ce qui est exactement le cas de Cheryl Strayed quand elle décide de dépouiller le « vieil homme » et de partir – seule – pour une rando de 1700 km sur le Chemin des Crêtes du Pacifique.

Le Chemin des Crêtes du Pacifique : The Pacific Crest Trail (PCT). Un « sentier » qui s’étend – sans interruption – de la frontière mexicaine à la frontière canadienne. En longeant neuf chaînes de montagnes : la Sierra de la Laguna, les monts San Jacinto, les montagnes de San Bernardo, les monts San Gabriel, les monts Liebre, la Sierra Nevada, les monts Klemath, la Chaîne des Cascades. A travers la Californie, l’Oregon et l’Etat de Washington.

Née en 1968, Cheryl Strayed a déjà publié un roman, Torch (2006). Installée aujourd’hui à Portland, Oregon, elle écrit pour de nombreux journaux, dont le New York Times Magazine, le Washington Post Magazine, la Missouri Review, etc.

Quand elle décide de faire cette longue virée, qui est tout sauf une promenade de santé, elle veut surtout oublier une vie en miettes. Sa mère vient de mourir d’un cancer. Elle vient de divorcer. Elle porte un lourd héritage de junkie déglinguée.

Elle n’a aucune idée de ce qui l’attend et du chemin de croix qui va être le sien. Chargée d’un sac dix fois trop lourd pour elle (et pour n’importe qui d’ailleurs), un sac qui lui scie les épaules, les pieds en sang, le moral dans les chaussettes, elle marche : « J’ai regardé vers le nord, dans sa direction, la seule pensée de ce pont (le « Pont des dieux » qui enjambe le fleuve Columbia) me gardait comme un phare. J’ai regardé vers le sud, d’où je venais, l’étendue sauvage qui m’avait formée et endurcie. J’ai réfléchi aux différents solutions qui s’offraient à moi. Je savais qu’il n’y en avait qu’une seule d’envisageable. Continuer à marcher ».

La Pacific Crest Trail n’est pas, on l’a dit, une longue piste tranquille. Il faut repérer les hypothétiques points d’eau. Eviter les ours et les serpents à sonnette. Subir des orages apocalyptiques. Crever de chaleur. Crever de froid. Etre à la merci de mauvaises rencontres. Mais aussi d’autres plus amicales.

Au départ personne – et surtout pas elle – ne donnait à Cheryl Strayed la moindre chance d’aller jusqu’au bout de sa quête. Et pourtant : « J’étais arrivée. Je l’avais fait. C’était si insignifiant et si magistral à la fois – une sorte de secret que je me répèterais longtemps, même si je n’en saisissais pas encore la portée. Je suis restée plantée là de longues minutes, au bord des larmes, tandis que voitures et camions filaient derrière moi. Mais je n’ai pas pleuré ».

La tête et les jambes. Les jambes épuisées. Mais la tête – et l’âme – enfin apaisée.

Alain Sanders

- Arthaud

http:www.atelier-folfer.com

 

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