La désinformation autour de la guerre de Sécession

Quatre questions à Alain Sanders

 

Alain Sanders publie dans la collection sur la désinformation de l’Atelier Fol’fer La désinformation autour de la guerre de Sécession, ouvrage dans lequel il tord le cou aux idées reçues qui font des Nordistes des gens vertueux et justes et des Sudistes de sales types racistes. Il démontre que le Nord n’a pas agressé le Sud pour des « raisons humanitaires » et déboulonne au passage la statue de Lincoln sise à Washington. Ce faisant il fait œuvre pédagogique et patrimoniale. – C.R.


— Dans La désinformation autour de la guerre de Sécession vous évoquez dans un chapitre « les vraies raisons d’une sécession » dont les prémisses, affirmez-vous, ont eu lieu trente ans avant la déclaration de guerre de 1861. Expliquez-vous.

— Effectivement, dans les années 1830, la Caroline-du-Sud, qui sera en 1861 la première à faire sécession, avait déjà menacé de le faire. Pour protester contre des taxes et des impositions prohibitives favorisant les Etats du Nord au détriment de ceux du Sud. En 1861, les mêmes causes ou presque ont provoqué les mêmes effets, sauf que cette fois-là la Caroline-du-Sud a refusé de rentrer dans le rang.

— La volonté première de Lincoln, dont il est coutume de dire qu’il a été le premier à lutter contre l’esclavagisme, était-elle réellement d’abolir ledit esclavage ?

— Cette vision d’un Lincoln abolitionniste est une escroquerie absolue. Il a lui-même déclaré, en 1860, que s’il pouvait maintenir l’Union sans libérer un seul esclave il le ferait sans hésiter. Rappelons que la famille de Lincoln possédait des esclaves quand le général Lee et Jefferson Davis, le futur président de la Confédération, avaient depuis longtemps affranchi les leurs. Le prétexte abolitionniste n’a été excipé par Lincoln qu’en 1862 quand il s’est aperçu que ce prétexte « humanitaire » pouvait lui valoir la compréhension des Etats européens (notamment la France et l’Angleterre) dont les sentiments étaient plutôt pro-sudistes.

— A quel moment et pourquoi le Sud put-il célébrer ses morts et revendiquer son héritage ? Quel en fut l’acte le plus emblématique ?

— On peut dire que c’est à partir de 1870, quand ses territoires n’ont plus été occupés militairement, que le Sud a commencé à relever la tête. Cela s’est notamment traduit par l’autorisation d’élever un monument à ses morts dans l’enceinte du cimetière d’Arlington installé, faut-il le rappeler, sur un domaine qui appartenait à la famille Lee depuis des générations…

— Aujourd’hui les Sudistes sont-ils considérés de façon condescendante par les Nordistes ?

— J’aurais plutôt tendance à vous répondre que ce sont les Sudistes qui ont un sentiment de supériorité à l’égard des Nordistes. D’abord parce que, économiquement, la plupart des Etats du Sud sont les « petits dragons » de l’économie américaine. Mais aussi parce que le Sud a finalement eu sa revanche, tant au cinéma que dans la littérature, les plus grands écrivains américains étant originaires des Etats méridionaux. De plus, il y a dans le Sud une douceur de vivre qui attire bien des retraités nordistes (ce qui n’est pas sans poser des problèmes). Finalement la prédiction du général Lee après la défaite : « The South’ll Rise Again » (« Le Sud renaîtra de ses cendres ») s’est réalisée.

Propos recueillis par Catherine Robinson

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