René Moreau a rejoint le honky tonk des anges

 

Nous n'irons pas déjeuner ensemble, comme nous nous étions promis de le faire, au Holly's Diner d’Évreux, dans ce décor des fifties et des sixties qu'il aimait tant. Après avoir lutté avec courage, et sans jamais se plaindre contre le « Big C », comme disait John Wayne, René Moreau nous a quittés.

Il est allé rejoindre le honky tonk des anges où, il y a quelques années, son copain d'enfance Peter Lacoste, du groupe Apache, était parti en éclaireur. Il sera là pour l'accueillir et ils auront bien des choses et des souvenirs à égrener.

René Moreau était généreux à tous les sens du terme. Jusqu'à la démesure parfois. Un jour que je m'étonnais de voir chez lui plusieurs guitares – et des guitares de marque – alors qu'il n'en jouait pas, il me répondit, comme une évidence : « Mais c'est pour les amis qui en jouent ! Quand ils viennent à la maison, ils ne risquent pas d'être dépourvus au cas où... » Et les « au cas où », il savait les susciter..

Il aimait les gens, la musique et les bonnes choses de la vie, les réunions entre copains, la fête. Et il n’était jamais aussi heureux que lorsqu'il pouvait combiner tout ça.

Depuis quelque temps, avec la complicité de son épouse, Agnès, et de son fils, Nicolas, il avait créé une radio web, « Est en Ouest », où la country, le western, l'American Way of Life, régnaient en maîtres.

A l'origine, René venait du yé-yé. Mais, quand je le taquinais à ce sujet, il me disait : « Le yé-yé, oui, mais le yé-yé qui adaptait en français des chansons country venues de là-bas ». D'Est en Ouest encore une fois...

Une année, lui qui connaissait Nashville et la Fan Fair via les voyages organisés par l'ami Gérard Meffre, il était venu découvrir en notre compagnie ce Texas avec lequel nous le bassinions à longueur de temps. Austin, San Marcos, Bandera, Luchenbach, Gruene, San Antonio, Alamo, les missions espagnoles, le Broken Spoke, les honky tonks imprévus au détour de routes improbables, il en était revenu émerveillé et conquis et ne rêvait que d'y revenir. Malgré son état de santé, il y a encore trois, quatre mois, il me disait que dès qu'il irait un peu mieux... Hélas...

Dans sa petite ville de Sorel-Moussel, en Eure-et-Loir, il aura eu ce dernier bonheur d'organiser récemment un bal country très réussi. Ce succès lui avait donné le goût de projeter d’autres réunions de ce type, voire d'organiser un petit festival et des conférences pour raconter l'histoire de la musique et de la danse country à usage des nouveaux venus. Le destin en a décidé autrement. Mais, jusqu'au bout, René aura eu cette grâce de ne jamais pécher contre l'espérance.

Tous ses amis et ses proches, à Country Music Attitude, à Music Box, ses amis croisés dans des festivals du temps où il y en avait encore, vont conserver l'image d'un homme tranquille qui, par-delà l'âge, la maladie, les épreuves, aura su garder une part d'enfance (il était abonné au Journal de Mickey depuis des lustres). Nul doute que cela lui sera compté au Ciel.

Alain Sanders

 

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