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Lionel Shriver : Propriétés privées Ce besoin ardent de posséder |
Née en Caroline du Sud (USA), Lionel Shriver vit aujourd'hui à Londres où elle exerce son métier de journalistes dans des journaux pas forcément recommandables comme The Guardian ou The New York Times. Elle est, à ce jour, l’auteur de six romans remarqués, comme Il faut qu'on parle de Kevin (adapté au cinéma par Lynne Ramsay), Big Brother (2014), Les Mandible (2017), etc. Pour son premier recueil de nouvelles, un genre éminemment anglo-saxon et éminemment boudé par les Français, Propriétés privées (Belfond), elle a choisi de mettre en scène un thème spécifique : la propriété. Celle que nous nous octroyons sur les objets – ma voiture, ma maison, mon entreprise – bien sûr, mais aussi sur les gens – ma femme, mon mari, mes enfants – qui nous entourent. Un recueil de douze nouvelles, plus ou moins longues, pour illustrer les abus que peut engendrer cet ardent besoin de posséder. Des textes ironiques et cruels qui, s'ils n'échappent pas toujours au prêt-à-penser (on n'écrit pas impunément dans The Guardian), ne manquent pas d'un sagace esprit d'analyse. Ainsi en va-t-il de l'histoire de ce fils et de ce père qui se déchirent pour 160 dollars et le prix d'un timbre-poste. Ou encore de cette artiste qui, rejetée par son meilleur ami, va déployer des trésors de machiavélisme pour récupérer le cadeau, spectaculaire il faut bien le dire, qu'elle lui avait fait naguère. On aime bien, aussi, la mésaventure de ce couple qui entreprend de faire déguerpir de la maison leur fils de trente ans qui joue les prolongations façon Tanguy. |
Mais le fiston, en bon millennial (la génération Y qui regroupent les personnes nées entre le début des années 80 et la fin des années 90), met en musique la « méchanceté » parentale sur les réseaux sociaux et devient une pauvre victime et une star du net (« Terrorisme domestique »). Au sortir de ce livre, vous vous demanderez peut-être, comme l'écrivain Edward Morgan Forster (auteur notamment de Chambre avec vue), passé à la postérité sous le nom de E.M. Forster (pour des raisons qu'il serait trop long d'expliquer) : « Si vous possédez des choses, quel est leur effet sur vous ? » La réponse étant qu'on veut en posséder encore plus... Mais il y a peut-être pire : ne rien posséder du tout, par exemple. Alain Sanders |
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