Robert E. Lee (1807-1870)

L'homme de marbre

 

Considéré comme l'un des meilleurs stratèges de l'armée des États-Unis, Robert E. Lee se vit offrir le commandement en chef des armées nordistes quand éclata la guerre entre les États (« guerre de sécession »). Il le refusera comme il refusera, après la défaite, les postes prestigieux qui lui furent proposés en Europe  : « Je ne puis abandonner l’État où je suis né, la Virginie, à l’heure de sa plus grande détresse. Je dois partager son sort et souffrir avec elle. Il est de notre devoir de vivre. Que deviendraient les femmes et les enfants du Sud si nous n'étions plus là pour les protéger? »

Né le 19 janvier 1807, mort le 13 octobre 1870, Lee est le cinquième enfnat d'une fratrie de cinq. Sa famille descend d'une des plus anciennes lignées d'Angleterre : il y a un Robert Lee, comte de Lichtfield, aux côtés de Richard Cœur de Lion à Saint-Jean d'Acre. Son père, Henry Lee, a commandé la cavalerie de Washington. Sa mère, Anne Hill Carter, appartient aux familles de notables de Virginie.

Orphelin de père assez tôt, Robert, appuyé par sa mère, fait de bonnes études et, à l'âge de 16 ans, intègre West Point. Il en sort second en 1829 et va dès lors connaître, avant et après son mariage, la vie d'un jeune officier.

Les différentes garnisons où il se fait remarquer par la qualité de son commandement, puis la guerre du Mexique. Il fait preuve d'une impavide bravoure lors des combats de Vera Cruz, Cerro Gordo, Chapultepec (il y sera blessé), etc.

Le général Ambert, à qui on doit un essai remarquable, Cinq Epées (Mame & Fils, 1896), l'une de ces « épées » étant Lee, a écrit : « Le général Lee a été vaincu, son armée a déposé les armes, mais sa grande âme est restée entière et son honneur n'a pas souffert de la défaite ». Ce fut vrai des années durant et jusqu'à très récemment. La plupart des présidents américains, et singulièrement Theodore Roosevelt, Dwight Eisenhower, Gerald Ford, lui ont rendu des hommages appuyés. Aujourd'hui, la haine racisto-gauchiste prétend démolir les statues à son effigie et débaptiser les bâtiments, écoles, lycées, routes, autoroutes, parcs, lieux de mémoire – il y en a des centaines – à son nom...

Le Nord, le Sud... Deux mondes antinomiques et irréconciliables. Chez les Yankees, des puritains, descendants des bourgeois, parlementaires et boutiquiers anglais du XVIIe siècle. Des donneurs de leçons qui brandissent la Bible à tout propos, lancent des anathèmes, et ont toujours un prêche sur le feu. Au sud, un enracinement paysan et l'allant des Gallant Cavaliers de Charles 1er qui taillèrent des croupières aux Round-Heads (« Les Têtes-Rondes ») de Cromwell. Des chrétiens contre des bigots fanatiques. Des Venséens contre des Jacobins.

Lee avait affranchi les esclaves de sa propriété d'Arlington (confisquée après la guerre). Il disait qu'un chrétien ne pouvait avoir d'esclave : « L'esclavage est un mal moral et politique ». La belle-famille de Lincoln, qui a tenu des propos difficiles à citer sur les « Nègres », possédait des esclaves et les conserva jusqu'à la fin de la guerre. Le président des États confédérés, Jefferson Davis, avait adopté – pour l'élever comme et avec ses enfants – un petit Noir arraché à son « maître » qui, soit dit en passant, était un Noir affranchi...

Le prestige de Lee était tel, après la défaite de 1865, qu'il y eut une majorité d'Américains – et pas seulement des Sudistes, donc – pour lui demander de se présenter à la présidence des États-Unis contre cet alcoolique de Grant. A la même époque, Julia Ward Howe, Nordiste farouche et auteur de l'hymne des armées unionistes, The Battle Hymn of the Republic, va lui consacrer un poème d'hommage se terminant par ces mots : « Nous t’honorons toi, fils de la Virginie ». Mais ça, c'était hier. Aujourd'hui, le Potomac charrie des flots de haine...

Mais de part et d'autre de la Mason-Dixon Line, qui fait frontière entre le Nord et le Dixieland, la légende et l’histoire de l'homme de marbre continuent de remplir de fierté les cœurs et les âmes nobles.

Alain Sanders

 

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