Quand vous lisez que l’on compare le roman (1) de Ron Carlson, Le Signal, aux œuvres de Hemingway, Jim Harrison, Cormac McCarthy, vous vous dites : « A ce point ? » Et vous ouvrez le livre. Avec cette accroche de départ : « Il enchaîna les grandes boucles qui dessinaient la piste à travers la haute forêt de trembles, puis traversa la vaste prairie jusqu’à la lisière des pins, au point de départ du sentier de Cold Creek, et gara le vieux pick-up Chevrolet bleu de son père à côté de la pancarte déglinguée, dans la douce lumière crépusculaire de septembre. » Alors, immédiatement, vous le sentez : on est parti pour un grand roman. Américain, certes. Mais un tout simplement grand roman.

L’action se passe dans le Wyoming. Et c’est déjà, par-delà l’histoire en elle-même, un décor, une magie, des paysages à couper le souffle. Mais le Wyoming, c’est beaucoup plus que le Wyoming. La preuve, c’est que Le Signal est tout à la fois un roman d’amour, un western moderne, un thriller qui flirterait avec le polar.

Longtemps, Mack et son père ont fait tourner ce qu’on appelle un dude ranch. A savoir un ranch où, aux beaux jours, les nantis de la côte Ouest et de la côte Est viennent jouer aux cowboys. Il y en a des puants qui se pavanent dans des chemises siglées à deux cents dollars. Et d’autres plus sympatoches qui vivent, l’espace d’un été, leurs rêves de gosses. Mack est en charge des uns. Et des autres.

Et puis un jour, c’est classique, il va tomber amoureux de Vonnie, une étudiante venue de l’Est. « Le ranch était son premier amour et il l’aimait jour et nuit. » Le second sera Vonnie qu’il épouse pour le meilleur et pour le pire. Il y aura du meilleur. Et du pire. La mort du père. Les dettes qui s’accumulent. L’alcool. Un mariage qui part en brioche. Une séparation. Une autre femme pour Mack. Un autre homme pour Vonnie.

Pour la dernière fois, Mack et Vonnie décident d’aller camper dans ces montagnes du Wyoming où leur amour est né. Mais, pour Mack, cette balade du dernier adieu est aussi celle d’une dernière mission dont l’a chargé un rascal de première. Une mission foireuse mais qui peut lui permettre de sauver et de garder son ranch. A savoir retrouver, grâce à un faible signal – d’où le titre du roman – GPS, une balise égarée lors du survol de la région. Une aiguille dans une meule de foin…

Sur la route de ce couple brisé, des ours, des randonneurs, des braconniers, des sales types. Tous les éléments, comme l’a noté The New York Times Book Review, pour une histoire « sur un territoire terrible et stupéfiant ». Innocente Vonnie et caractériel Mack ? Ce n’est pas si simple… L’action se déroule en six jours. Mais, au septième jour, à la différence de Dieu qui créa – aussi – le Wyoming, ils ne se reposeront pas. Parce que, dans ces contrées rudes, quand « ta carabine est enrayée, mon garçon, tu es nu comme un ver »…
Alain Sanders

Alain Sanders

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(1) Son dernier roman, mais on lui en doit beaucoup d’autres et autant de nouvelles.

– Editions Gallmeister, 16 rue du Regard, 75006 Paris. http://www.gallmeister.fr