Le premier roman de James Carlos Blake, L'Homme aux pistolets (paru en 1995), était consacré à un hors-la-loi de légende (peu connu en France pourtant), John Westley Hardin. Un choix normal pour quelqu'un qui, comme lui, a été nourri très tôt aux westerns et aux films noirs.

Cet intérêt – voire une certaine fascination – pour les outlaws, on le retrouve dans son dernier roman (« plein de bandits violents, mais honorables » comme USA Today l'a plaisamment écrit), Handsome Harry (Gallmeister). C'est la vie et les aventures d'un des lieutenants de John Dillinger (dont la réputation a passé l'Atlantique pour le coup) : « Handsome Harry » Pierpont, le « Bel Harry » pour les dames.

Le livre étant étiqueté « roman », ce n'est pas une biographie du gang Dillinger que relate James Carlos Blake. Il a inventé – voire réinventé – bien des choses. Mais peu somme toute. Il nous le confirme :

– Il peut être intéressant pour le lecteur de savoir que tous les personnages principaux de ce livre ont existé, et que la plupart des événements importants ont réellement eu lieu. Il est à noter, cependant, qu'une bonne partie des sources historiques sont vagues, contradictoires ou erronées. Quoiqu'il en soit, cet ouvrage est un roman et, en tant que tel, se préoccupe moins des faits que de la vérité...

On peut se demander pourquoi, alors que Dillinger avait d'autres bras droits hauts en couleurs, Blake a choisi Harry Pierpont. La réponse va de soi : parce qu'il était un personnage de roman idéal. James Carlos Blake explique : « J'ai choisi Harry comme narrateur, non seulement parce qu'il est le cœur du récit, mais aussi parce qu'il a le courage et la lucidité nécessaires pour raconter l'histoire de façon honnête ».

Né à Muncie, Indiana, en 1902, Pierpont était un beau gosse, un séducteur à la parole tendre, toujours attentif et délicat avec ceux qui l'entouraient (mais implacable avec ses ennemis). Un vrai gangster de l'époque de la Prohibition. A la différence d'un Dillinger, toujours prêt à se faire valoir, Pierpont laissait les autres se vanter d'être les acteurs d’audacieux braquages de banque qu'il avait lui-même conçu et assuré.

Après la mort de Dillinger, tué par le FBI le 22 juillet 1934, Pierpont et Markey, une autre pointure du gang, tous deux condamnés à mort, tentent de s'évader du pénitencier de Columbus, Ohio. En menaçant les gardiens avec des faux pistolets façonnés dans des pains de savon et noircis avec du cirage... Markey sera tué dans l'action et Pierpont grièvement blessé. Ce qui ne le sauvera pas de la mort : le 17 octobre 1934, il passe à la chaise électrique. Il est enterré au Holy Cross and St. Joseph Cemetery d'Indianapolis, Indiana.

John Carlos Blake fait dire au « Bel Harry » : « On ne veut de mal à personne, on aime juste les belles voitures, les jolies filles et les fêtes entre copains. On sait bien que ça ne va pas durer, que les flics nous attraperons un jour ou l'autre ». Bien vu... Harry, « Handsome Harry », est mort à 32 ans.

Auteur d'une dizaine de romans, d'essais et de biographies, James Carlos Blake nous livre là « une échappée séduisante à cent à l’heure » (San Francisco Chronicle).

Alain Sanders