Le 25e Country Rendez-Vous de Craponne

Un quart de siècle de vraie country


Georges Carrier, un die hard Texan et Alain Sanders

 

A Dore-l’Eglise d’abord puis, bientôt, à Craponne-sur-Arzon et, très vite encore, grâce à Georges Carrier, le Country Rendez-Vous Festival s’est imposé comme le tout premier – et à notre avis le seul – festival de country music en Europe. Au point de devenir la référence absolue aux Etats-Unis en général et au Texas – thank you Mr. Georges – en particulier.

Cette année, une fois de plus, le bonheur était dans l’Opry. Avec, néanmoins, une grande tristesse : nous dirons au final laquelle. Avec dix chanteurs et groupes américains et une formidable surprise, un groupe très roots venu de Croatie, Crooks & Straights.

Un mot pour évoquer les Frenchies invités cette année, tant sur la grande scène qu’au festival off. Epreuve du feu très réussie pour Erik Sitbon & The Ghost Band (le vendredi). Coup de Stetson au groupe bluegrass Howlin’Fox, déjà plébiscité lors du off de 2011 (ils ont ouvert le dimanche soir). Bel accessit encore pour Laurette Canyon & The Gold Diggers qui ont eu la chance de leur vie : programmés pour le off, ils ont remplacé sur la grande scène le Texan Justin Haigh, retenu aux USA à la dernière minute. Coup de cœur habituel pour notre ami Pierre Lorry et son Phenix Country Band qui nous a fait ses adieux : Pierre continue désormais sa carrière en solo et il est aussi le lead singer des Honky Tonk Farmers, des Suisses qui ont déjà fait Craponne. A citer aussi les Hillbilly Rockers qui n’ont pas démérité.

Mais, puisqu’on parle des Français, un mot de la chanteuse d’un groupe (elle se reconnaîtra) qui, lors de sa conférence de presse, a montré une indécente complaisance (pour ne pas dire plus) pour les line dancers (elle était venue avec son fan club, très démonstrativement bruyant). Il faudrait dire à cette petite dame que Craponne n’est pas un truc pour remueurs de popotins qui gigotent alors que passent sur scène des chanteurs de chair et de sang. Craponne, ce n’est pas un petit babal du samedi soir avec des CD et des danses plus ou moins (et plutôt moins) country. C’est le nec plus ultra de la real thing. La musique en live, ça s’écoute. Et pas avec les fesses.

Cela dit – et il fallait que cela fût dit – revenons aux choses sérieuses. Le groupe Crooks & Straights a été, nous l’avons dit, une des belles surprises de Craponne 2012 : que ces Croates ont la country dans le sang, Zagreb les yeux !

Leur ont succédé The Steeldrivers, un groupe de bluegrass qui, dans le respect de la tradition, renouvelle le genre. Et aussi du lourd, du très lourd : The Turnpike Troubadours, très red dirt, avec cette assurance que peuvent avoir les groupes qui ont fait leurs premières armes dans des honky tonks un peu crapoteux. Après ça, rien ne leur fait peur.

 


Avec Kelly Willis


John Slaughter, un redneck du Texas

 


Ronnie Bowman, la magie du bluegrass

Pour rester au même niveau, il ne fallait pas moins que des chars de combat : le groupe Two Tons of Steel (en exclusivité pour Craponne) étaient pour ce faire the right persons in the right place.

Le samedi, on n’a pas touché terre. Avec l’un de mes préférés d’abord, le groupe Modern Earl, quatre Sudistes de choc avec lesquels on referait volontiers la guerre de sécession ! Ils ont enflammé le public. Cela n’a pas fait peur à Amber Digby & Midnight Flyer. Amber est jolie comme un cœur, ce qui est bien, elle chante comme un honky tonk angel, ce qui est mieux.

Pour rester dans le rêve, Kelly Willis et son mari, Bruce Robison (l’un des meilleurs songwriters à l’heure actuelle), ont donné son étiage littéraire à la country. La country, ça n’est pas du rythme (ça peut être aussi du rythme), c’est d’abord des mots. Et des chansons qui tiennent de la poésie. Tout ça pour dire que je n’ai guère été emballé par le groupe Whiskey Myers. Bien que texans, ils ne sont pas my cup of ice tea. Mais il en faut pour tous les goûts, paraît-il.

Le dimanche a été l’apothéose. Avec au final – et ça c’est la touche inégalable de Craponne, le label Georges Carrier – le Bayou Roux, un big band cajun originaire de Lafayette qui nous a fait un Mardi-Gras façon New Orleans. A coup sûr, l’un des sommets de ce 25e Country Rendez-Vous !

Ils avaient été précédés par deux pointures :le Ronnie Bowman Band et John Slaughter (avec lequel j’ai passé un bon moment backstage : c’est vraiment my kind of people). Le Ronnie Bowman Band, c’est du bluegrass (un genre qui a les faveurs du public de Craponne, preuve que c’est un rendez-vous de connaisseurs). John Slaughter, Texan jusqu’au bout des bottes, multi-intrumentiste talentueux, est aux antipodes de la supposée new country. Où sont mes racines, Nashvile ou Austin ? Austin, bien sûr !

 

Modern Earl, country et rock sudiste
 
Bayou Roux, Louisiane et Mardi-Gras

Au début, j’ai dit que ce 25e Country Rendez-Vous a été pour nombre d’entre nous entaché de tristesse. Comme il n’y a pas de beaux cowboys sans de belles cicatrices, il n’y a pas de grands festivals country sans un petit quelque chose qui nous prend le cœur. Cette fois, il ne s’agit de rien de moins que de l’annonce du retrait de Georges Carrier. Plutôt que longs discours, je trouve plus utile de reproduire la lettre qu’il a envoyée à certains d’entre nous :

« Chers amis, j’ai décidé ce jour, avec effet immédiat, de quitter mes fonctions au sein du Conseil d’administration de l’association régissant le Festival Country Rendez-Vous de Craponne-sur-Arzon.

« J’ai été très honoré par la confiance que vous m’avez manifestée durant ces treize années de présidence et ces quatorze années en tant que responsable de la programmation artistique et de la communication. C’est par mon engagement, mon travail, mon intégrité et mes résultats auxquels j’associe Jocelyne et les bénévoles que j’ai réussi, grâce à votre soutien médiatique sans failles, à faire du Country Rendez-Vous le premier festival de musique country de France et l’un des tout meilleurs d’Europe, reconnu par toutes les instance, dont la Country Music Association de Nashville et le Texas Music Department du Gouverneur Rick Perry.

« Je souhaite bon courage à la nouvelle équipe car ce n’est qu’à l’aune de ces mêmes valeurs qu’elle parviendra à maintenir le festival au rang qu’il mérite. »

Acceptons-en l’augure. Mais cela ne nous empêche pas d’avoir le cœur lourd.

Alain Sanders

Photos : Country Music Attitude

Retour

Tous droits réservés - Country Music Attitude 2011