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Gloria Naylor : Les
Femmes de Brewster Place |
Le premier roman de l’Afro-Américaine (comme on dit aujourd’hui) Gloria Naylor, Les Femmes de Brewster Place, a été publié en 1987 par Belfond qui le republie dans sa belle collection « Vintage ». A sa parution aux Etats-Unis, ce livre eut un grand succès. Il recevra le National Book Award en 1983 et fera l’objet d’une adaptation télévisée – à succès elle aussi – produite et interprétée par Oprah Winfrey. Nous sommes dans une banlieue du nord des Etats-Unis en 1970. Mattie Michael, originaire du Sud, vient de s’y installer. Ayant eu un enfant hors mariage, elle a été rejetée par son père et elle tire le diable par la queue pour élever dignement son enfant. C’est son histoire d’abord, sa lutte, ses malheurs, qui nous sont racontés. Agée, elle est devenue une sorte de matriarche qui vient en aide aux femmes de Brewster Place qui sont, quasiment toutes, des cas sociaux. A l’époque de la parution du roman, le Washington Post écrivit : « Vibrant d’émotions brutes, le roman de Gloria Naylor s’enracine dans la plus pure tradition du blues. Comme lui, Les Femmes de Brewster Place chantent la tristesse et les déboires de femmes noires aux Etats-Unis, mais aussi leur immense fierté. » Le
talent de Gloria Naylor – et ce qui donne à son livre une
portée universelle – c’est qu’elle ne donne
jamais dans la victimisation. Si elles sont des « victimes »,
ses héroïnes le sont aussi – le sont d’abord
– des hommes de leur propre communauté (1). |
Ces femmes s’appellent Mattie Michael, Etta Mae Johnson, Kiswana Brown, Cora Lee, Luciela, Louise Turner, etc. Elles doivent faire face à un quotidien de misère(s) et de violence(s), mais elles y répondent avec humour et, plus que tout, avec tendresse. Brewster Place, comme l’écrit Gloria Naylor, est un « enfant bâtard ». Un ensemble d’immeubles lépreux pour des laissés pour compte. Mais les filles de couleur de ce ghetto sinistre chassent la grisaille : « Quand les fins de mois étaient difficiles, et que (leurs hommes) n’arrivaient pas à payer le loyer, elles faisaient la plonge dans la cuisine d’autrui. Elles n’hésitaient pas à employer des grands moyens quand il fallait, s’il y avait quelque amourette dans l’air avec la petite garce du coin. Sous des dehors rugueux, elles cachaient un cœur d’or ; elles étaient exigeantes, mais se satisfaisaient de peu ». Parmi ces femmes, Kiswana, de son vrai prénom Mélanie, qui est allée se dégotter un prénom yoruba au grand dam de sa mère : « C’est quand même bizarre que tu puisses oublier un nom auquel tu as répondu depuis vingt-trois ans ». Kiswana se bat contre l’intolérance. A l’extérieur de Brewster Place, mais aussi dans Brewster Place où l’installation d’un couple de lesbiennes blacks, Lorraine et Sophie, va mettre le quartier en ébullition. Et se terminer par un drame. La méchanceté humaine se joue, hélas, de la condition sociale et de la couleur de la peau… Alain Sanders _____________________________________________ (1) « Evitant avec maestria les pièges du roman sentimental et du mélo, l’auteur donne à lire une magnifique histoire de courage et de compassion » (The New York Times Book Review). -
Belfond/Vintage. |
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